L’avenir des passoires

En France aujourd’hui, un logement sur six porte l’étiquette F ou G dans le classement de l’observatoire des performances énergétiques. C’est ce qu’on nomme les « passoires thermiques ». Si le Pré Saint-Gervais se situe dans la moyenne, on doit y trouver 1400 passoires. On y grelotte l’hiver et l’on étouffe l’été, sauf à dépenser des fortunes en chauffage et en climatisation – des dépenses qui vont devenir phénoménales avec l’explosion des prix de l’énergie.

Merci à Tommy dans cet article de Reporterre

Quant aux dégâts pour l’environnement, ils sont considérables. Car à l’autre bout, seulement 1/20e des logements sont « basse consommation », classés A ou B. L’ensemble des bâtiments imparfaitement isolés – pas seulement des logements, d’ailleurs – constitue ainsi un obstacle principal à l’objectif français de neutralité carbone en 2050. Ils comptent pour près de 50% dans la consommation finale d’énergie par le parc immobilier, et pour 18% dans l’émission des gaz à effet de serre.

Or ce n’est pas irrémédiable. Les techniques permettant une isolation de qualité sont au point. Les professionnels compétents existent. Les factures d’électricité ou de gaz peuvent être divisées par deux ou trois. Qu’est-ce qu’on attend ?

S’agissant des locations, on attend déjà que les propriétaires, publics ou privés, se soucient de la santé, du confort et des factures énergie des occupants. C’est parfois le cas mais c’est trop peu fréquent, et les contraintes en ce domaine sont faibles : quand les logements correctement isolés sont rares, les passoires trouvent facilement preneurs.

Du côté des propriétaires – qu’ils habitent ou non eux-mêmes dans les logements à rénover – tout ne va pas de soi non plus. Ils peuvent être tentés de s’en tenir à un changement du système de chauffage (pompe à chaleur, notamment), ou en tout cas à un « geste » de rénovation, simple, plutôt rapide, mais permettant quand même d’accéder à une aide publique comme « MaPrimeRénov’ ». Or les rénovations performantes nécessitent d’intervenir sur plusieurs éléments à la fois, si possible en une seule campagne de travaux, de façon bien conçue et coordonnée dès le départ. Rares sont les propriétaires qui ont les compétences – et le temps – qu’il faut pour mettre en place un dispositif technique bien au point. Des services d’accompagnement et de conseil existent, pourtant, mais pas forcément connus, ni faciles d’accès.

L’autre problème est évidemment celui de la dépense. Même avec une rénovation bien pensée, et un emprunt que les économies d’énergie aident ensuite à rembourser, il subsiste un « reste à charge » bien trop lourd pour les familles les moins fortunées. L’enjeu majeur est donc du côté des aides publiques. Le gouvernement se vante de les avoir fait progresser mais, selon un rapport remis l’an dernier au ministère de la Transition Ecologique, rénover les logements en France au rythme nécessaire de 500 000 par an nécessiterait « un doublement (!) de l’effort budgétaire actuel en direction des ménages », pour parvenir à 11,6 milliards d’euros par an.

Une belle somme, certes – mais c’est seulement 4,6% du budget de l’Etat, avec un formidable bilan environnemental et un sacré coup de pouce à la création d’emplois sur le territoire national. Or face à ce « doublement » réclamé, le gouvernement, dans son « plan de sobriété énergétique » début octobre, a annoncé que le budget de MaPrimeRénov’ passerait de 2,4 milliards… à 2,5 !

Comme a dit un jour le président de la République, « ce deuxième quinquennat sera écologique ou ne sera pas ». À chacun.e de voir, sur cet exemple majeur, ce qu’il faut en conclure.

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